Je ne suis qu’un re ? ve, dans ton sommeil.Je te dirai: console-moi, console-moi.Quelqu’un enfonce des clous dans mon c?ur!Je te dirai, a` toi: le vent est frais,Les eґtoiles — au-dessus des te ? tes — sont chaudes...
Aux juifs
Toi, buisson de roses ardentes, quiNe t’a pieґtineґ, qui ne t’a eґcraseґ!Seul immuable laisseґ sur terre,Apre`s lui, par le Christ.Israёl! Ton deuxie`me re`gneApproche. Vous nous avez payeґDe votre sang toutes les oboles:Heґros! Tra?tres! Prophe`tes, mercantiles!En chacun de vous — me ? me s’il compte son orDans son baluchon, pre`s d’une chandelle —Le Christ parle plus fort qu’en Marc,Ou Matthieu, ou Jean, ou Luc.D’un bout a` l’autre de la terre:Crucifixion et descente de Croix...Avec le dernier de tes fils, Israёl,C’est le Christ que nous enterrons.J’aimerais vivre avec Vous —Dans une petite villeAux creґpuscules eґternels,Aux eґternelles cloches —Avec la sonnerie deґlicateD’une horloge ancienne — les gouttes du temps —Dans une petite auberge de campagne.Et le soir, quelquefois, d’une mansarde ou l’autre —Une flu ? te,Et le flu ? tiste a` la fene ? tre.Et de grandes tulipes aux fene ? tres.Vous ne m’aimeriez, peut-e ? tre, me ? me pas.Au milieu de la chambre — un poe ? le de faїence eґnorme,Avec sur chacun des carreaux — une image:Une rose — un c?ur — un bateau —Et derrie`re l’unique fene ? tre:La neige, la neige, la neige.Vous seriez coucheґ — comme je vous aime: insouciant,Indiffeґrent, paresseux.De temps en temps, le brusque frottementD’une allumette.La cigarette s’allume, s’eґteint,Et longtemps, longtemps, tremble a` son extreґmiteґUn court cylindre gris — la cendre.Vous e ? tes trop paresseux pour la secouer.Et toute la cigarette vole dans le feu.
Don Juan
1A l’aube froide,Sous le sixie`me bouleau,Au coin, pre`s de l’eґglise,Attendez, Don Juan!Je vous le jure, sur mon fianceґ,Heґlas, et sur ma vie,On ne sait, dans mon pays,Ou` s’embrasser!Chez nous, pas de fontaineEt les puits sont geleґs, —Et les Saintes ViergesOnt des yeux seґve`res.Et pour que les bellesN’eґcoutent pas les vainesParoles, — nous avonsUn tre`s sonore carillon.Je pourrais vivre ainsi,Mais j’ai peur — de vieillir,Et puis, mon beau, ce paysNe vous convient pas.Dans un manteau d’ours,Qui vous reconna?trait? —Si ce n’eґtait les le`vres,Vos le`vres, Don Juan!2Longtemps la tempe ? te, et les pleursDe la neige. — A l’aube brumeuse,On a coucheґ Don JuanDans un lit de neige.